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octo.
25
2009
Biocarburants - Un nouvel éclairage sur une question brûlante

Un Groupe international lance une évaluation à grande échelle sur le pour et le contre des carburants agricoles.

Selon un rapport présenté dernièrement, l'élaboration de biocarburants respectueux de l'environnement demandera un travail très pointu.

Les gouvernements devraient intégrer les biocarburants dans leur stratégie générale sur l'énergie, le climat, l'utilisation des terres, l'eau et l'agriculture pour qu'ils répondent aux besoins de la société, de l'économie et de l'environnement.

Selon le rapport, le premier du Groupe international sur la gestion durable des ressources du Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE), certains biocarburants de première génération, comme l'éthanol produit à partir de canne à sucre, peuvent avoir un impact positif sur les émissions de gaz à effet de serre.

Tels qu'ils sont utilisés actuellement au Brésil pour remplacer le pétrole, ils entraînent une réduction des émissions de 70 à bien plus de 100 pour cent.

Cependant, selon la façon dont ils sont produits, les biocarburants émettent plus ou moins de gaz à effet de serre. Plusieurs méthodes de production particulièrement nocives sont identifiées, notamment la production et l'utilisation de biodiesel de palmiers à huile cultivés sur des tourbières tropicales. Cela peut entraîner une forte augmentation des émissions de gaz à effet de serre - jusqu'à 2 000 pour cent ou plus par rapport aux combustibles fossiles surtout à cause du carbone émis par le sol et la terre. Par contre, quand les palmiers à huile ou le soja sont cultivés sur une terre abandonnée ou dégradée les émissions peuvent être limitées.

Le rapport Towards Sustainable Production and Use of Resources: Assessing Biofuelsanalyse en détail les recherches publiées jusqu'au milieu de l'année 2009 et reprend les conclusions d'experts indépendants.

Les gouvernements et l'industrie pourront ainsi faire des choix durables dans un domaine où, au cours des dernières années, se sont affrontées des théories extrêmement divergentes.

Achim Steiner, Secrétaire général adjoint des Nations Unies et Directeur exécutif du Programme des Nations Unies pour l'environnement, hôte du Groupe sur les ressources a déclaré : « Il ne faut considérer les biocarburants ni comme la panacée, ni comme paria mais comme toutes les technologies, ils constituent à la fois une chance et un défi. »

« C'est pourquoi, il est urgent que le débat s'ouvre réellement et c'est justement là l'objectif de ce premier rapport du Groupe sur les ressources. D'un côté on se demande quelles variétés cultiver et où et, de l'autre on s'interroge sur la manière dont chaque pays et fabricant de biocarburants va promouvoir et gérer la production et la transformation du matériel végétal en énergie. Si certaines techniques sont respectueuses du climat d'autres sont très discutables » précise-t-il.

« Pourtant, il s'agit aussi de choisir comment l'humanité gère au mieux ses réserves foncières limitées et équilibre des intérêts contradictoires dans un monde peuplé par six milliards d'habitants et qui en comptera plus de neuf d'ici 2050. »

« Le rapport indique clairement que les biocarburants auront un rôle à jouer, mais il souligne aussi que la lutte contre le réchauffement climatique, pour l'amélioration des moyens de subsistances des populations rurales et un développement durable qui pourrait, ou non, nécessiter qu'une plus grande quantité de cultures et de déchets agricoles soit transformée en combustible liquide, passe par d'autres moyens » explique-t-il.

« Dès le départ la Commission européenne a fermement soutenu le Groupe sur les ressources. » Cet avis scientifique compétent et indépendant qui accompagne les politiques dans une perspective globale fait partie de notre stratégie à long terme de gestion durable des ressources naturelles. Nous pourrons ainsi concevoir et cibler des critères de durabilité de l'utilisation des biocarburants » a déclaré Timo Timo Mäkelä de la Commission européenne.

Sous la direction du Professeur Ernst Ulrich von Weizsäcker, le rapport a été rédigé par plusieurs scientifiques dont le Dr Stefan Bringezu du Groupe de travail sur les biocombustibles. On peut y lire notamment que :

- Les centrales électriques locales à base de bois, de paille, d'huile de semences ou autres déchets ou produits agricoles sont « généralement plus rentables que celles qui transforment la biomasse en combustible liquide. »

- Sur les terres, y compris celles abandonnées, on pourrait cultiver des plantes énergétiques, mais aussi les reboiser ou installer des centrales solaires, plus efficaces, selon le rapport, pour transformer la lumière du soleil en énergie.

- Cependant, dans les transports, des transferts modaux, des normes de rentabilité plus strictes et l'élaboration de technologies alternatives telles que les véhicules électriques pourraient entraîner une forte baisse des émissions.

Le rapport souligne que la loi sur l'indépendance énergétique des États-Unis impose une baisse de la consommation des automobiles et des camionnettes de 40 pour cent d'ici 2020. De même, le Japon devrait voter une réduction de 20 pour cent d'ici 2015 alors que les constructeurs automobiles assurent que 80 pour cent des véhicules remplissent déjà ces critères.

Le Professeur Weizsächer déclare : « Les gouvernements doivent aussi prendre en compte la question du cycle de vie au sens large dans leurs choix politiques et certaines recherches doivent être menées urgemment. La culture de plantes énergétiques peut entraîner l'utilisation massive d'engrais avec ses conséquences sur la qualité de l'eau et une hausse des émissions de N20 qui est lui-même un important gaz à effet de serre. »

« L'utilisation des terres abandonnées, ou réputées telles, pour la production de biocarburants pourrait être un choix sensé, mais elle a aussi des conséquences sur la biodiversité et certains projets forestiers permettraient de mieux limiter les émissions de gaz à effet de serre » ajoute-t-il.

Dr. Bringezu a déclaré : « Si les terres cultivées sont utilisées pour nourrir une population en nombre croissant et qui mange plus de viande, toute demande supplémentaire de cultures énergétiques augmentera presque inévitablement la pression sur les pâturages, la savane et les forêts. Cela entraînera une augmentation des émissions de gaz à effet de serre ainsi qu'une diminution de la biodiversité. L'utilisation des déchets et des résidus représente un chemin plus sûr et plus durable pour sortir de ce dilemme. »

Principaux résultats :

Le marché des biocarburants

La production mondiale d'éthanol destiné aux transports a triplé entre 2000 et 2007, passant de 17 milliards de litres à plus de 52 milliards de litres.

Celle de biodiesel a été multipliée par onze, de moins d'un milliard de litres à 11 milliards de litres.

La part des biocarburants dans les transports s'élève à 1,8 pour cent.

Plus de 4 milliards de US$ ont été investis dans la capacité de production de biocarburant en 2007.

Il y a eu peu d'échanges internationaux, environ 3 milliards de litres en 2006/07, mais ce chiffre devrait augmenter rapidement dans des pays comme le Brésil qui, en 2008, a exporté cinq milliards de litres.

Changement dans l'utilisation des terres et impacts des biocarburants de première génération

Au niveau mondial, les surfaces cultivées ne vont augmenter que pour nourrir une population mondiale croissante qui demande une alimentation plus riche en protéine d'origine animale. Toute nouvelle demande de culture de biomasse non alimentaire incitera à la conversion des terres naturelles.

Les cultures destinées à la production de biocarburant représentaient environ deux pour cent des surfaces cultivées dans le monde en 2008, soit environ 36 millions d'hectares.

Parmi les biocarburants de première génération on peut citer l'éthanol tiré de la cane à sucre ou du maïs ou le biodiesel fabriqué à partir de colza, de soja ou d'huile de palme.

Il faudra cultiver entre 118 et 508 millions d'hectares pour satisfaire 10 pour cent de la demande mondiale en carburant destiné aux transports d'ici 2030 avec les biocarburants de première génération.

D'un côté ces biocarburants pourraient remplacer 0,17 à 0,76 milliard de tonnes de CO2 fossile. De l'autre, le changement de l'utilisation des terres conduirait à une augmentation des émissions de 0,75 à1,83 milliard de tonnes de CO2.

Dans l'ensemble, les émissions de gaz à effet de serre auraient plutôt tendance à augmenter dans les prochaines décennies en raison de la production de biocarburants agricoles.

Ce nouvel usage des terres pour la production de biocarburant ne peut être évité par la simple mise en place d'une norme ou d'une certification tant que la demande mondiale de biomasse augmente. En cas de certification, les producteurs non certifiés, particulièrement dans l'alimentation, se tourneraient vers d'autres débouchés.

Les avantages et les inconvénients pour le climat des différents biocarburants

Un biocarburant sera respectueux du climat ou limitera le réchauffement en fonction de plusieurs facteurs, en premier lieu s'il est produit à partir de cultures de résidus ou de déchets. Dans ce dernier cas, l'environnement est protégé, le recours à de nouvelles terres n'est pas nécessaire et les avantages économiques sont nombreux.

Les processus de culture et de transformation de la biomasse en carburant déterminent la performance environnementale.

On considère que l'industrie de transformation de la canne à sucre en éthanol brésilienne a un effet positif sur le climat notamment parce qu'elle utilise ses déchets tels que la bagasse pour répondre à la demande nationale en électricité.

Le bioéthanol de maïs peut être moins respectueux du climat si le combustible fossile sert à la transformation de la culture en combustible liquide. Selon la rentabilité des usines modernes entre autres, sa production entraîne une baisse des émissions de CO2 de près de 60 pour cent par rapport à l'essence, soit 5 pour cent d'émission de gaz à effet de serre en plus.

La fabrication de biodiesel d'huile de palme permet une réduction de 80 pour cent des émissions par rapport aux combustibles fossiles. Cependant, si le palmier est cultivé sur des terres arrachées à la forêt tropicale, les émissions de gaz à effet de serre peuvent représenter 800 pour cent de plus.

Et si les terres proviennent de tourbières en forêt, les émissions peuvent augmenter à 2 000 pour cent.

Parmi les biocarburants intéressants, on peut citer le biométhane provenant du fumier, avec une réduction supérieure à 170 pour cent, et l'éthanol de deuxième génération produit à partir de déchets agricoles et forestiers (entre 80 et 90 pour cent de réduction par rapport au pétrole).

Le jatropha, une plante énergétique dont la culture est recommandée dans les terres arides en Inde et en Afrique, peut permettre une réduction des émissions de gaz à effet de serre s'il est cultivé dans des terres dégradées, ou au contraire une augmentation des émissions s'il est produit dans la brousse en raison du changement de l'utilisation des terres. Cependant, il faut aussi tenir compte du fait que cela permet de répondre à des besoins énergétiques actuellement satisfaits grâce à l'utilisation de biomasse traditionnelle, qui conduit souvent à la déforestation avec, une fois encore, son impact sur le changement climatique.

Des impacts autres que le changement climatique doivent être pris en compte. Le rapport souligne les impacts sur la qualité et la quantité d'eau et la biodiversité.

Pour aller plus loin

Le rapport demande que les gouvernements s'engagent sur d'autres pistes de recherche, notamment :

- Harmonisation des normes de biocarburants à partir d'une évaluation internationalement reconnue des cycles de vie, qui tient compte des aspects environnementaux plus larges comme les émissions de gaz à effet de serre liées aux engrais, à l'impact sur l'eau et les implications sur l'utilisation des terres.

- Réévaluation des missions, cibles et quotas des biocarburants actuels pour que la demande ne dépasse pas les conditions d'une production durable, en tenant compte de l'impact mondial sur l'utilisation des terres en fonction d'objectifs nationaux.

- Limitation des superficies cultivées dans des écosystèmes naturels de grande valeur tels que les forêts et les zones où la biodiversité est importante. Le Brésil, par exemple, met au point un système de zonage pour la production de palmiers à huile qui distingue entre les terres adaptées et celles qui ont une grande valeur conservatoire.

- Évaluation globale de la quantité de terres dégradées dans le monde qui pourraient être mieux adaptées à la fabrication de biocarburants qu'à la production alimentaire, la forêt ou la régénération naturelle, en fonction de leur viabilité économique.

- Augmentation durable des rendements dans des pays ou des régions comme l'Afrique, pour que la production, tant alimentaire qu'énergétique, à l'hectare augmente.

- Recherche sur la performance environnementale de carburants de nouvelle génération (de deuxième ou troisième) dérivés par exemple des déchets ou de végétaux comme le panic ou les algues marines.

- Comparaison des avantages relatifs de la production d'énergie fixe sur la transformation de biomasse en combustible liquide dans certains sites, ainsi que ceux des biocarburants sur l'énergie solaire aux mêmes endroits.

- Mise en place de politiques de baisse générale de la consommation énergétique nationale par le biais de taxes et de normes d'efficacité. Par exemple, la Directive de l'Union européenne sur le rendement et les services énergétiques prévoit que chaque État membre doit améliorer sa rentabilité énergétique d'au moins un pour cent par an.

Source : Communiqué PNUE



 
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